Homélie de Mgr Touvet pour l’ordination diaconale de César MUNOZ et Marc-Antoine LUDWIG

Ordination diaconale
de César MUNOZ et Marc-Antoine LUDWIG
Samedi 14 décembre 2024
3ème Dimanche de l’Avent
Église Saint-Michel de Draguignan

Chers frères et sœurs,

Nous entrons ce soir dans la célébration du 3ème dimanche de l’Avent, le dimanche de la joie. Gaudete ! Réjouissez-vous ! Ça tombe bien : nos cœurs sont dans la joie pour l’ordination de César et Marc-Antoine. Pas une excitation ou une rigolade parce qu’on pourrait se croire au cœur de l’Empire romain avec un empereur et un consul au milieu de nous ! – c’était facile, je ne pouvais pas laisser passer … ! – Pas du rire, donc, mais de la joie pour accueillir dans l’allégresse le don de Dieu pour son Église. Depuis deux semaines, nous cheminons avec toute l’Église pour préparer la route au Seigneur, nous cherchons à aplanir les montagnes et à combler les ravins, à faire jaillir de l’eau dans le désert. Nous attendons avec confiance la venue du Seigneur au milieu de nous. Il ne vient pas dans la tristesse mais il suscite une joie déjà présente qui ne demande qu’à grandir encore et à se partager.
Dans quelques jours le Saint-Père ouvrira le jubilé, et notre diocèse entrera dans cette démarche de pèlerinage le dimanche de l’Epiphanie en communion avec l’évêque de Rome qui ouvrira ce jour-là la porte sainte à la basilique Saint-Paul hors les murs. Pendant une année, nous célébrerons dans la joie l’anniversaire de la naissance de Dieu parmi les hommes. Ce sera en quelque sorte Noël chaque jour.
L’ordination diaconale arrive aujourd’hui comme un beau cadeau de Noël anticipé, non seulement pour les ordinands et leurs familles, pour la paroisse qui les accompagne et nous accueille, mais aussi pour toute l’Église. Nous jubilons parce que nos deux frères choisissent d’avancer pour se donner comme serviteurs de tous à l’image de Jésus. Nous recevons leur engagement comme un signe du Ciel qui nous invite à la joie et aussi à l’action concrète pour offrir cette joie autour de nous. Il nous revient en effet à tous, fidèles du Christ, parce que nous avons été baptisés « dans l’Esprit-Saint et dans le feu », de prendre notre part de la mission de l’Église. Il nous revient d’aplanir les montagnes de la violence et de la haine, du mensonge et de la méchanceté. C’est notre mission que de combler les ravins de l’indifférence et de la paresse. Nous sommes appelés aussi à faire jaillir des sources de vie et d’espérance dans le désert spirituel, moral et affectif de notre monde. Si je reprends ici les mots et les paroles imagées du prophète Isaïe que nous avons entendues au cours de la liturgie il y a quelques jours, nous sommes envoyés dans le monde pour que « la vache et l’ourse aient le même paturage, que le loup habite avec l’agneau, que le léopard se couche près du chevreau, que le veau et le lionceau soient nourris ensemble, que le nourrison s’amuse sur le nid du cobra , que l’enfant étende la main sur le trou de la vipère » …. C’est notre mission de porter au monde l’Évangile de la joie, et d’entrainer dans la confiance à la rencontre du Seigneur.

Jean-Baptiste nous rappelle aussi quelques exigences de la vie chrétienne en réponse à toutes les questions qui lui sont posées par ceux qui viennent au Jourdain lui demander d’être baptisés : « que dois-je faire ? » « que devons-nous faire ? » « Celui qui a deux vêtements, qu’il partage avec celui qui n’en a pas. Et celui qui a de quoi manger, quil fasse de même » « ne faites violence à personne, n’accusez personne à tort, contentez-vous de votre solde » « n’exigez rien de plus que ce qui vous est fixé ». Pendant ce temps de l’Avent, chacun d’entre nous a pu déjà s’engager sur un chemin de conversion pour préparer la route au Seigneur. Il peut se reconnaître dans les consignes données par Jean-Batiste, comme il peut se retrouver dans d’autres actions comme le réconfort et le soutien, l’écoute bienveillante et patiente, l’offre du pardon et de la paix, le renouveau de la vie de prière, la fidélité à se nourrir de la Parole de Dieu, une ardeur missionnaire nouvelle, la miséricorde pour les malades et les mourants, l’accompagnement et l’éducation des enfants et des jeunes, etc.

Marc-Antoine et César se sont avancés il y a un instant. Ils vont bientôt exprimer devant l’assemblée leur intention d’assumer toutes les charges du ministère diaconal, et de vivre aussi l’obéissance envers leur évêque. Une fois ordonnés, ils recevront le livre des Evangiles avec cette parole : « Recevez l’Évangile du Christ que vous avez la mission d’annoncer. Soyez attentif à croire à la Parole que vous lirez, à enseigner ce que vous avez cru, à vivre ce que vous aurez enseigné. » C’est du concret : vivre ce que l’on enseigne ! Ils s’inscrivent dans le sillage d’Isaïe et de Jean-Baptiste pour être des serviteurs de la joie par leur action concrète. « Que votre bienveillance soit connue de tous les hommes », nous dit saint Paul dans sa lettre aux Philippiens. Dans ce monde marqué par tant de tristesse, d’angoisse et d’inquiétude, le diacre est envoyé pour faire resplendir la beauté de l’Évangile, pour manifester dans les réalités de ce monde que Dieu est présent et que son nom est Emmanuel, Dieu avec nous. Le monde a soif et faim de justice et de paix, d’amour et de vérité, de lumière et de confiance. Par son ministère, le diacre ouvre son cœur aux détresses et aux pauvretés, il s’engouffre dans les vallées profondes et ténébreuses, il franchit les montagnes qui font obstacle à la rencontre, il recueille et distribue avec grande bonté l’eau de la source qui jaillit dans le désert. Vous avez sans doute déjà remarqué le visage d’un malade qui bénéficie d’un soin apaisant, d’un enfant perdu qui est retrouvé et consolé, d’un pauvre auquel on est attentif, du mendiant qui reçoit un morceau de pain, du détenu qui est libéré, de la personne victime qu’on écoute. Le diacre est serviteur de cette joie du renouveau, de la renaissance, de la résurrection. Il est serviteur de la joie, non pas en animant la fête, mais en étant témoin humble et caché de la présence douce et aimante du Seigneur qui se fait proche, tel un frère. Reprenant le geste de celui qui porte le brancard avec d’autres pour monter le paralysé sur le toit et le descendre auprès de Jésus, reprenant le geste du samaritain qui conduit le blessé à l’auberge, prend soin de lui, donne de l’argent et demande de ses nouvelles, reprenant le geste de ceux qui sont passés dans la foule avec les corbeilles pour distribuer le pain et les poissons, reprenant le geste de Jésus qui se met à genoux pour laver les pieds de ses disciples, le diacre apporte la joie profonde du salut, la joie qui jaillit dans nos cœurs au jour de Noël, la joie d’accueilir Jésus qui vient, la joie de recevoir ses bienfaits. Avec la grâce que vous recevez du Seigneur par l’imposition des mains et le don du Saint-Esprit en ce Dimanche de « Gaudete », chers frères Marc-Antoine et César, vous devenez diacres de la joie. Tout au long de l’année du jubilé, et même au-delà, vous ferez que ce soit Noël chaque jour.

En célébrant la sainte Eucharistie ce soir, nous entrons dans le grand mystère qui est la cause profonde de notre joie et de notre espérance : Jésus le Christ, Fils éternel de Dieu, est mort sur la croix. Il a vaincu la mort au matin de Pâques. Nourris du Corps du Christ et abreuvés du Sang du Christ, vous allez répandre la joie par rayonnement de charité et de bonté, de miséricorde et de grâce. Nous vous portons dans notre prière en redisant au Seigneur notre désir d’aller, nous aussi, porter la joie : « pousse des cris de joie, éclate en ovations, réjouis-toi… le Seigneur est en toi, tu n’as plus à craindre le malheur. Il aura en toi sa joie et son allégresse, il te renouvellera par son amour, il exultera pour toi et se réjouira comme aux jours de fête » .
Noël chaque jour … nous y sommes !

Amen.