Homélie pour la fête du séminaire

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Fête du séminaire

L’Eglise contemple en Marie l’accomplissement de son propre mystère et de ce que l’humanité est appelée à devenir. Marie est le témoin d’un monde nouveau, inauguré par le Christ, Sa vocation précède la nôtre car elle est déjà parvenue au but. Dans la tempête, Marie est le premier navire qui a franchi la barre et gagné le port.

L’Immaculée Conception nous parle de la prévenance de Dieu. La Vierge Marie a été gracieusement préservée de la faute originelle. Elle a bénéficié par avance et par pure miséricorde, du fruit de la Rédemption. Elle est la première des rachetés.

Marie se sait redevable de ce geste de Dieu gratuit et providentiel à son égard. Elle nous rappelle sans cesse cette prévenance. Dieu l’a protégée du mal qu’elle aurait pu commettre et de toute complicité avec le péché. Marie personnifie cette prévenance. « Elle est plus jeune que le péché », disait Bernanos.

Chers séminaristes, en ce jour de fête du séminaire, rappelez-vous que vous êtes, vous aussi, débiteurs de la grâce du Seigneur qui est à l’origine de votre vocation. Vous n’avez pas prise sur votre appel du Christ pour le service de son Église. Cet appel vous précède. Il vous nourrit. Il vous déborde. Il vous transporte. Le fiat que vous avez à prononcer et à reprendre chaque matin, doit faire de votre existence une réponse radicale au choix de Dieu sur vous dans une orientation de vie où le Seigneur devient le centre de vous-même et de votre mission. Et votre responsabilité, tout au long de votre formation, sera d’en prendre toute la mesure et aussi la démesure, d’y consentir corps et âme, d’en assumer à la fois la grâce et le prix. Il est à la fois chemin de vie et chemin de croix.

Le Christ ne vient pas vous dérober à vous-même, disposer de votre vie, de votre corps, de votre avenir et de tous vos biens aux dépens de votre liberté, au mépris de votre consentement. Bien au contraire, c’est par la libre offrande de soi, en faisant de notre vie une réponse au don que le Christ a fait de lui-même ; c’est dans l’humble service de son Eglise… que vous allez trouver l’accomplissement plénier de vous-même. Comme pour Marie, l’oblation de soi nous rend féconds, de la fécondité même de Dieu qui naîtra de sa chair.

Offrir sa vie pour le Christ et pour l’Eglise est source d’accomplissement de soi car nous avons été créés par amour et pour l’amour, c’est-à-dire pour la donation de soi. Ste Thérèse de l’Enfant Jésus aimait à dire : « aimer c’est tout donner et se donner soi-même ». Cette oblation est à la fois une grâce et une tâche, mais également un combat. Car il en coûte de s’offrir jusqu’au bout. Mais notre combat personnel est enchâssé dans le combat victorieux du Christ. Comme le dit le livre des chroniques : « ce combat n’est pas le vôtre, mais celui de Dieu » (2 Ch 20,15). Nos luttes au quotidien, affrontés que nous sommes à nos peurs, à nos doutes, à notre passé, à nos pesanteurs, à nos découragements et à tous nos péchés… nous font participer et entrer dans le combat spirituel du Christ, Lui qui a embrassé par avance en son agonie et en sa passion, en sa mort et en sa résurrection, toutes les luttes spirituelles des hommes jusqu’à la fin des temps. Cette découverte de la présence du Christ au cœur des contradictions et des oppositions, faisait exulter de joie l’apôtre Paul : « je trouve ma joie dans les souffrances que j’endure pour vous, et je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ, pour son corps qui est l’Eglise », écrira-t-il aux Colossiens (1, 24). L’apôtre des Gentils expérimentera en sa chair la puissance de Dieu qui se déploie au cœur de sa faiblesse. La présence du Seigneur surgit des profondeurs de l’abîme. C’est en creusant qu’elle se révèle.

La solennité de l’Immaculée Conception est non seulement l’accueil d’une grâce (« Il s’est penché sur son humble servante », dira-t-elle), mais aussi action de grâces. C’est le chant du Magnificat. Et encore action de la grâce. Là où le Christ se rend présent, il n’est pas possible que rien ne change ; là où Il prend chair, quelque chose de nouveau advient. La présence du Christ est transformante. Marie éprouvera en ses entrailles cette transformation intime que produit la grâce de Dieu et qui suscite son allégresse.

Vous êtes donc invités, chers séminaristes, à faire l’expérience de cette conversion du cœur et de l’esprit tout au long de votre cheminement vocationnel. En répondant à l’appel du Christ et de l’Eglise, en laissant le Christ habiter votre être de plus en plus intimement, en écoutant fidèlement sa Parole, en éclairant votre intelligence par l’enseignement de l’Eglise, vous chercherez humblement et fidèlement à ce que le Christ advienne en vous jusqu’à ce que vous soyez configurés au Christ serviteur et prêtre, au jour de votre ordination et par la vertu du sacrement de l’Ordre.

Séminaire, étymologiquement, se réfère au mot semence. Le séminaire constitue bien un lieu de germination, d’engendrement de soi à Dieu pour le service de son Eglise. On pourrait dire, une salle d’accouchement. En sachant qu’ici, la grossesse ne dure pas 9 mois mais plus de 7 ans, et même après l’ordination et jusqu’au terme de votre existence sacerdotale, la maturation de l’appel continuera de s’accomplir et de se parfaire.

Marie sur qui repose la « plénitude de la grâce » (Jn 1, 16), est chargée de vous accompagner sur ce chemin sinueux qu’elle a elle-même emprunté. Elle est notre éducatrice dans l’ordre de la vertu, en particulier, comme le rappelait la Vierge à Ste Faustine lors de l’une de ses apparitions, la mère du Christ nous enseigne « l’humilité, la chasteté, l’amour envers Dieu ».

L’Eglise contemple déjà en Marie l’œuvre de Dieu réalisée dans le Christ. Marie est à la fois un membre éminent de l’Eglise et son modèle le plus achevé. Sa figure parfaite et tutélaire. Elle la précède. Elle est sa promesse.

Chers séminaristes, la fête de ce jour vous rappelle l’amour que vous devez porter à cette Eglise. Elle est votre maison. Elle est votre mère. Composée de pécheurs, l’Eglise du Christ n’est sainte que de la sainteté du Christ qui en a fait son Corps, et que par la grâce du Christ qui nous invite, grâce à elle, à vivre un chemin de conversion.

Marie, mère de l’Eglise et dont elle est l’icône, dans les épreuves des temps incertains que traverse le monde, l’Eglise, notre Eglise diocésaine… nous aide à garder le cap, à conserver la foi au milieu des tempêtes, des tourmentes et des turpitudes. Elle se trouve avec nous et elle est aussi devant nous par son Assomption. Sa maternité vigilante distille en nos cœurs ces paroles évangéliques qui nourrissent toujours nos prières : « Je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta Parole » à l’occasion de l’Annonciation, « Faites tout ce qu’Il vous dira », lorsque Marie se trouve à Cana et introduit Jésus dans son ministère public. Marie fait une expérience trinitaire de Dieu : appelée par le Père, remplie de l’Esprit-Saint, elle accueille le Verbe fait chair en sa chair. Marie fait une expérience charnelle de Dieu, l’engendrement du Fils éternel à son humanité. Marie fait enfin une expérience missionnaire qui la dessaisit d’elle-même et la lance dans une aventure spirituelle et théologale pour que le Salut de Dieu soit annoncé au monde. C’est à cette charité que nous sommes appelés à notre tour pour proclamer au monde le salut de Dieu.

Chers séminaristes, vous ne serez pas prêtres pour vous-mêmes, mais pour le service de vos frères et sœurs en humanité. Vous répandrez cet amour au-delà de vous-mêmes, par contagion, par effusion, en raison du débordement de l’amour de Dieu en vous, à travers vous, et au-delà de vous-mêmes.

En ce beau domaine de La Castille, l’Immaculée, patronne de ce site, nous convie à l’espérance. Chers séminaristes, vous êtes une espérance pour l’Eglise qui a besoin de saints prêtres et qui attend beaucoup de votre engagement. Votre style de vie doit être un message d’Evangile adressé à tous.

Le pape François répète à l’envi : « espérer, c’est s’engager ». L’espérance est la vertu de l’action. Votre cheminement vocationnel requiert persévérance, confiance et une ardeur de chaque instant, afin de devenir pleinement disciple missionnaire du Christ. Et que le Christ advienne de plus en plus en vous. Pour devenir un jour, un instrument de la grâce de Dieu, encore faut-il que vous viviez en vérité et en sainteté ce que vous allez annoncer et célébrer. Votre être sacerdotal sera alors un signe sacramentel de la présence du Christ et de sa proximité. C’est cette conformité de votre être à la mission pastorale qui sera le critère suprême du discernement de votre appel pour recevoir un jour l’ordination.

Merci à chacun d’entre vous pour votre oui à Dieu que vous exprimez à la suite du fiat de la Vierge. Tant et tant de fidèles prient pour vous, comptent sur vous.

L’appel du Christ et de l’Eglise ne vous appartient pas. Votre cheminement appelle la remise plénière de vous-même entre les mains de Dieu et de son Eglise. Il doit se faire sans présomption ni découragement, en poursuivant fidèlement votre chemin de foi, sous le regard maternel de la Vierge Marie.

 

+ Dominique Rey

10 décembre 2022

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