Homélie de Mgr Touvet pour la fête du Séminaire de La Castille
Fête du séminaire
Institutions de 3 lecteurs et 10 acolytes
Samedi 7 décembre 2024
Immaculée Conception
La Castille
Chers frères et sœurs,
Monseigneur Rey, cher Dominique,
Chers parrains des séminaristes et bienfaiteurs du séminaire,
Vous chers séminaristes,
Aujourd’hui même, on se presse, on se précipite à Notre-Dame de Paris. Le monde entier a les yeux tournés vers la cathédrale qui renait de ses cendres. Nous, les évêques, étions invités à ce grand événement au retentissement mondial. Nous avons choisi la modestie de notre chère Castille parce que nous y sommes très attachés, comme vous tous, et parce que la fête du séminaire revêt une importance telle que même ND de Paris ne peut prendre le dessus. Avec un peu d’avance, nous célébrons la Bienheureuse Vierge Marie, Immaculée Conception, sainte patronne de notre séminaire. C’est sous son regard que quelques séminaristes vont être institués lecteurs ou acolytes. Nous lui demandons aujourd’hui sa protection maternelle pour chacun et chacune d’entre nous, pour les lecteurs, pour les acolytes, et pour le séminaire lui-même.
Tout d’abord pour tous les baptisés que nous sommes. Nous avons été ensevelis avec le Christ pour renaître avec lui. Nous avons été recréés à son image et à sa ressemblance. Nous sommes devenus membres de l’Église. Par le bain de la nouvelle naissance, nous sommes passés du péché à la grâce, des ténèbres à la lumière, du mensonge à la vérité, de la mort à la vie. Nés avec la marque du péché originel, péché d’Adam et Eve dont nous avons entendu le récit dans la première lecture, péché de celui qui prétend pouvoir se passer de Dieu… notre péché donc, nous avons été lavés, purifiés en recevant le saint baptême. Et notre existence est ainsi tournée vers la vie éternelle, la communion bienheureuse avec le Seigneur. La Vierge Marie, l’Immaculée, n’a pas connu le péché. Dieu l’avait choisie pour être la mère du Sauveur, et l’en a préservée à cette fin. Elle est la demeure de Dieu parmi les hommes. Elle n’a pas connu la dégradation du tombeau, mais fut associée dès sa ‘dormition’ à la victoire du crucifié sur la mort. La Vierge Marie nous accompagne et nous soutient dans notre combat spirituel. Elle nous apprend à faire le choix de Dieu, à accueillir la présence de Jésus en nous, à lui donner naissance dans le monde d’aujourd’hui. Même revêtus de l’onction baptismale, il nous faut pourtant toujours nous convertir. En effet, nous sommes déjà sauvés, mais pas encore. Le combat contre l’Esprit du mal continue, il est à livrer chaque jour pour grandir en sainteté. « Il nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour. Il nous a prédestinés à être, pour lui, des fils adoptifs par Jésus, le Christ. Ainsi l’a voulu sa bonté, à la louange de gloire de sa grâce. » Marie nous conduit et nous guide, telle une mère qui veut le bien de ses enfants. Chacun peut donc renouveler aujourd’hui la remise de sa vie dans le Cœur immaculé de Marie afin que sa douce présence nous protège et nous soutienne dans la réponse à sa vocation personnelle, et dans l’exercice de sa mission d’évangélisation dans le monde.
Nous confions aussi les lecteurs à l’intercession de la Vierge Marie. Paul, Antoine et Arthur vont recevoir ce ministère institué. Marie est le modèle de tous ceux qui accueillent la Parole de Dieu et la donnent au monde. À Nazareth, elle entendit l’ange qui lui parlait au nom du Seigneur – c’est la page d’Évangile que nous avons entendue. La Vierge accueille en son sein Celui qui est la Parole éternelle, le Verbe. En se faisant « la servante du Seigneur », elle lui donnera naissance à Bethléem. « Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous » reprenons-nous dans la prière de l’Angelus. Le lecteur est celui qui est chargé de proclamer la Parole de Dieu. Il est appelé à le faire non seulement dans la liturgie en s’appliquant de telle sorte que la Parole lue soit audible par tous, mais aussi dans et par toute sa vie. Nous prierons pour les lecteurs avec ces mots : « Bénis nos frères dans leur ministère : qu’ils se nourrissent de ta Parole, qu’ils se laissent former par elle et l’annoncent fidèlement à leurs frères. » Pour Marie, c’était : accueillir, faire grandir, et donner chair à la Parole. Pour les lecteurs, c’est : écouter, méditer, et proclamer. Ils peuvent se tourner vers Marie pour apprendre comment vivre de la Parole de Dieu.
Nous confions aussi à la Vierge Marie ceux qui deviennent acolytes. Les dix séminaristes qui vont recevoir ce ministère se présentent devant l’Immaculée. Elle porta en elle le corps de Jésus, Dieu fait homme, et elle lui donna naissance en ce monde. On peut même penser à tous ces moments d’affection pendant lesquels elle tenait dans ses bras le corps de Jésus, le berçant comme nous voyons toutes les mamans le faire, comment elle prit soin de lui pendant toute son enfance. Plus tard à Cana, elle introduira Jésus lors des noces, et c’est là qu’il manifesta sa gloire en changeant l’eau en vin, ensuite distribué aux invités. Au pied de la croix, la Pieta reçut le corps du Messie crucifié dans ses bras. L’acolyte est associé à la célébration de l’Eucharistie, chargé de guider la prière et de distribuer le Pain de Vie. Nous prierons ainsi dans un instant au moment de l’institution : « Bénis nos frères dans leur service : qu’ils grandissent dans la foi et la charité ; qu’ils sachent animer la prière dans l’assemblée et qu’ils soient fidèles à distribuer le pain de vie, pour que s’édifie ton Eglise. » Pour vivre ce service, l’acolyte est invité à regarder Marie qui donne le corps du Christ au monde. Il va apprendre de la Vierge Mère comment l’entourer de respect et d’adoration, comment le recevoir en lui et goûter sa présence, comment le donner aux autres.
Enfin, frères et sœurs, c’est le séminaire lui-même, la communauté des formateurs et des séminaristes qui invoque avec ferveur l’Immaculée Conception. Son image est vénérée dans la chapelle, elle l’est aussi par tant de visiteurs de La Castille qui s’arrêtent au pied de la statue au bout de la grande allée devant le château, j’en suis témoin. « Posuerunt me custodem » = ils m’ont choisie pour gardienne – c’est l’inscription que chacun peut y lire. Cette année, nous avons célébré les 40 ans du séminaire réouvert par Mgr Madec. Et nous n’oublions pas qu’il fut installé ici, venant de Fréjus, après que la famille Aubert eut cédé le domaine à l’évêque pour qu’on y forme des prêtres. Depuis mon arrivée aux côtés de Mgr Rey il y a un an exactement, j’ai pu m’inscrire dans cette lignée des évêques de Fréjus-Toulon qui ont choyé le séminaire de La Castille. Nous sommes reconnaissants envers les recteurs successifs et les formateurs qui ont accompagné les séminaristes avec « amour et vérité », sans oublier les parrains et bienfaiteurs, vous tous chers amis. Après le temps des épreuves il y a 2 ans, nous avons pu conduire jusqu’à l’ordination les candidats en attente (20 ordinations diaconales et 9 ordinations sacerdotales en 2024 !), et nous rendons grâce.
Heureux du nouveau texte de référence pour la formation, la Ratio Nationalis, il nous faut construire une nouvelle étape désormais, en définissant ce qui est demandé : le « projet de formation intégrale . Nous le ferons avec soin, prudence, audace et réalisme. Nous le ferons avec courage dans le contexte actuel de baisse du nombre de séminaristes dans toute la France et du peu de vocations varoises locales. Nous sommes animés du désir d’offrir non seulement au diocèse, mais aussi plus largement à des communautés et des diocèses une formation de qualité, toujours dans la fidélité au Magistère et avec un élan missionnaire affirmé. Le travail est lancé. C’est un travail de ‘refondation’ qui ne gomme pas le passé – au contraire – et qui cherche des voies nouvelles sans céder toutefois à la tentation du chiffre. Il nous faut tout faire pour préserver ce lieu de formation. Cela me tient très à coeur. La question est la suivante : « Quels prêtres le Seigneur veut-il pour son Église dans les années qui viennent ? … dans ce contexte de sécularisation, de transmission plus difficile et de relativisme ? » Déterminé, je le suis. L’équipe du séminaire aussi. Nous sommes engagés dans ce travail pour garantir l’avenir de cette maison afin qu’elle soit encore et encore une source vocationnelle, un lieu d’accueil généreux, un cœur battant. C’est pourquoi nous nous tournons avec confiance vers Celle qui en est la gardienne. « Posuerunt me custodem ».
Toi Notre-Dame, nous te chantons. Toi notre Mère, nous te prions. Notre-Dame de La Castille, priez pour nous.
Amen.