L’école catholique prolonge le geste du Christ

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Homélie de monseigneur Dominique Rey le 7 octobre 2006 (messe de rentrée de l’enseignement catholique à la cathédrale de Toulon)

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L’école catholique prolonge le geste du Christ

«  Celui qui n’accueille pas le Royaume de Dieu à la manière d’un enfant, n’y entrera pas »

Au seuil de cette nouvelle année scolaire, l’école se trouve confrontée à de nouvelles évolutions :

  • D’ordre pédagogique, touchant non seulement la manière d’enseigner mais aussi le contenu à enseigner
  • D’ordre sociologique et culturel lié aux nouvelles conditions actuelles de transmission du savoir, à la crise des modèles référentiels, aux pertes de repères, au déni d’autorité, à l’insécurité affective. Evolutions déroutantes, accélérées, incertaines.

L’école catholique n’échappe pas à ces changements mais elle les assume sans doute mieux qu’ailleurs. Elle est appelée dans ce contexte problématique à s’interroger sur son identité. A se poser la question de sa raison d’être. A retrouver une nouvelle conscience d’elle-même, et du spécifique de son action. L’école « catholique » reçoit sa vocation de l’Eglise. Elle est un sujet, un acteur ecclésial. Elle est présence d’Eglise. Sa mission ne relève pas d’abord de sa propre réflexion interne, comme si elle se donnait à elle-même sa mission.

J’aime à relire ce que le Pape Jean-Paul II, dans une de ses nombreuses exhortations apostoliques, disait de l’école catholique : « Les écoles catholiques sont à la fois des lieux d’évangélisation, d’éducation intégrale, d’inculturation et d’apprentissage, de dialogue entre jeunes de religion et de milieux sociaux différents » (Exhort. Apost. En Africa 1995)

La pertinence, la fécondité, la lisibilité des œuvres éducatives de l’Eglise ressortent de sa capacité à assumer organiquement ces différentes tâches. Notre nécessaire réflexion sur le caractère propre de l’école catholique dans le contexte dans lequel celle-ci se trouve placée, doit prendre en compte et prendre en charge ces perspectives que rappelait Jean-Paul II. Je les reprends suivant 6 axes.

L’école catholique est un lieu d’éducation intégrale de la personne humaine

L’école catholique est d’abord un lieu d’éducation intégrale de la personne humaine et cette éducation a son fondement dans le Christ. « La personne de chacun, dans ses besoins matériels et spirituels, est au centre de l’enseignement de Jésus. C’est pour cela que la promotion de la personne humaine est au centre de l’école catholique » (Jean-Paul II au 2ème congrès de l’école catholique en Italie, 1991).

L’enseignement catholique part d’une conviction anthropologique : c’est dans le Christ que se trouve la plénitude de la vérité sur l’homme. Toutes les valeurs humaines trouvent leur réalisation foncière et leur convergence en Lui. On ne peut réduire l’éducation à ses aspects purement cognitifs ou pédagogiques. L’Eglise considère la personne du jeune dans son identité globale : les dimensions physiques, affectives, intellectuelles, morales, spirituelles doivent s’intégrer les unes aux autres. Par son humanité, Jésus-Christ est la référence inégalée de cette intégration. C’est à partir du Christ que se conçoit tout projet éducatif chrétien.

L’école catholique doit proposer une expérience ecclésiale

L’école catholique doit proposer une expérience ecclésiale dont la communauté chrétienne est la matrice (même si la famille doit constituer la première communauté chrétienne de l’enfant, son Eglise domestique). Cette expérience ecclésiale se déploie dans l’annonce de la foi (1ère évangélisation), la catéchèse, la vie sacramentelle, l’engagement de service du prochain. Elle suppose l’initiation à l’intériorité (la vie de prière suppose d’aménager des temps et des lieux de prière), le partage fraternel autour de la Parole de Dieu, l’enseignement de la foi (ce que être chrétien veut dire). L’expérience ecclésiale passe par le témoignage de vie.

Elle réclame que la foi de l’Eglise soit vraiment assumée par les chefs d’établissements, les éducateurs, les parents. Les uns et les autres doivent offrir le témoignage authentique de leur appartenance au Christ. Tant de jeunes et d’adolescents n’ont et n’auront de contact de l’Eglise que par le biais de l’école. C’est dire le prix de ce témoignage.

L’originalité de l’école catholique tient à la synthèse entre culture et foi

Troisième axe de l’école catholique : son originalité tient à la synthèse entre culture et foi. La pédagogie spécifique de l’école catholique consiste à articuler foi et raison, à faire émerger de l’intérieur même du savoir scolaire, une vision chrétienne du monde, de la vie, de la culture, de l’histoire.

Ainsi doit-on refuser la séparation entre d’une part les vérités à croire, et d’autre part, les connaissances à acquérir. Non qu’il faille nier la légitime autonomie des sciences et des savoirs, mais à les ressaisir tous deux dans une conception globale et religieuse de la vie. Ceci implique que les éducateurs chrétiens soient aussi compétents dans leur discipline, que cohérents dans leur existence : « maîtres de savoir et maîtres de vie ».

Le témoignage de la charité constitue également une marque distinctive du projet éducatif chrétien

Le témoignage de la charité constitue également une marque distinctive du projet éducatif chrétien. « Le souci de l’instruction, c’est l’amour » dit le livre de la Sagesse (Sg 6, 17). L’école catholique est une école pour tous, avec une attention particulière (privilégiée) pour les tout petits. L’école catholique a d’ailleurs trouvé son origine historique (et ses heures de gloire) dans la charité éducative envers l’enfance pauvre, démunie, abandonnée, privée de soins, livrée à la détresse morale et sociale.

Cette diaconie éducative conduit aujourd’hui l’école à s’intéresser aux nouvelles pauvretés et marginalités qui traversent nos sociétés.

L’école catholique remplit une fonction sociale

5ème axe : N’oublions pas que l’école catholique remplit une fonction sociale. Elle résulte certes d’initiatives privées, mais elle accomplit un service d’utilité publique. Il se veut de qualité, accessible à toute famille. L’école accomplit ce service en partenariat avec d’autres établissements publics et instances éducatives dans un climat de dialogue et de respect. Les écoles catholiques garantissent de ce fait, par leur présence, le pluralisme éducatif et religieux, et par-dessus tout, la liberté et le droit de chaque famille à l’éducation de son choix pour ses enfants.

Cette fonction sociale qu’assume bien l’école catholique en France nécessite légitimement l’aide des collectivités publiques (tant au niveau des dépenses de fonctionnement que des investissements) Sans l’octroi de ces aides, la liberté des familles serait formelle. Les négociations délicates que les responsables de l’enseignement catholique doivent engager pour défendre le statut institutionnel et financier des écoles, appellent le soutien, les encouragements et la mobilisation de tous les acteurs des établissements, en particulier des parents dans leur conscience citoyenne.

L’école catholique est portée par une communauté éducative

Dernier point : L’école catholique est portée par une communauté éducative. Elèves, parents, enseignants, équipes de gestion et personnels non enseignants, sous la responsabilité pastorale du chef d’établissement, doivent constituer une vraie communauté de vie. A ce propos, on doit rappeler l’importance du climat relationnel, de l’engagement de chacun, du dialogue interpersonnel, de la qualité des comportements quotidiens, de l’écoute… Ces attitudes pastorales sont plus éloquentes que les grands discours moralisateurs ou disciplinaires. Il faut aussi rappeler que les parents sont les premiers responsables de l’éducation de leurs enfants. Ils ne peuvent se dédouaner sur l’école de cette responsabilité. A l’inverse, l’école doit respecter les choix éducatifs des parents parce qu’elle se met à leur service en accueillant leurs enfants.

Chers frères et sœurs, l’évangile résonne pour nous de façon particulière en cette célébration de rentrée. « Celui qui n’accueille pas le Royaume de Dieu à la manière d’un enfant, n’y entrera pas ». Et, ajoute St Marc, « Jésus embrassait les enfants et les bénissait en leur imposant les mains. »

Nous pouvons faire nôtre cette attitude de Jésus par rapport aux enfants (attitude déconcertante à son époque). L’école catholique prolonge le geste du Christ en mettant l’enfant, sa croissance personnelle, sa découverte en Dieu du sens de sa propre existence, au centre de son projet éducatif. L’école catholique est amenée elle aussi à bénir l’enfance, à la soutenir, à l’encourager, et aussi à trouver en elle le visage de Dieu. Dieu s’est fait enfant. C’est la première manifestation de son humanité à Bethléem, à Nazareth. Première dans l’ordre chronologique. Première aussi dans l’ordre ontologique et spirituel. En servant du mieux que nous pouvons les enfants, c’est Dieu lui-même que nous trouvons en eux, que nous servons à travers eux, c’est Dieu qui mystérieusement nous bénit. Il nous fait la grâce de retrouver dans le regard de chaque enfant Son propre visage, mais aussi notre identité la plus profonde, « l’enfant » que nous ne cessons jamais d’être vis-à-vis du Père éternel. Car notre véritable enfance se trouve, non pas dans notre passé, mais en Lui, en Dieu. Dieu voit chacun comme son enfant unique, puisqu’il nous voit dans le Christ, son Fils bien aimé. S’occuper des enfants, c’est retrouver en eux notre propre jeunesse. En définitive, ils nous aident à nous réconcilier avec nous-même et avec Dieu.

« Celui qui n’accueille pas le Royaume de Dieu à la manière d’un enfant n’y entrera pas ! »

A l’occasion de cette messe d’ouverture, je vous exprime toute ma reconnaissance pour honorer avec générosité et fidélité le caractère propre de l’enseignement catholique. Les multiples initiatives dont j’ai été le témoin, en particulier lors de mes diverses visites pastorales, soulignent cet engagement et votre effort.

Soyez-en remerciés.

+ Dominique Rey
Evêque de Fréjus-Toulon
7 octobre 2006

 


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