Homélie de la messe chrismale

P3420349-Messe chrismale cathedrale Mgr Touvet huile TB
Mercredi 16 avril 2025
Cathédrale de Toulon
Chers frères et sœurs,
La messe chrismale est toujours un moment fort dans la vie d’un diocèse. Nous sommes dans la joie. C’est jour de fête pour notre Église. Notre Église est belle quand elle est ainsi réunie. Le peuple de Dieu est rassemblé dans la cathédrale, dans la limite de sa capacité bien sûr : fidèles baptisés, confirmés, et même quelques catéchumènes qui seront baptisés samedi soir, des personnes consacrées, les diacres, les prêtres, et l’évêque. Je souhaite vous partager aussi ma grande émotion ce soir de m’asseoir pour la première fois sur la cathèdre, le siège de l’évêque, comme je le ferai aussi à Fréjus ce Vendredi-Saint, étant devenu il y a 3 mois le pasteur du diocèse. Ce siège est le lieu d’où je préside la prière et enseigne par la prédication. De grand cœur, je veux vous remercier de votre confiance, de votre collaboration, et de votre prière pour votre évêque.
L’Église du Seigneur célèbre le mystère du Christ Sauveur, lui qui a reçu l’onction pour proclamer l’Évangile : « l’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction, il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur » : c’est le texte du prophète Isaïe proclamé par Jésus à la synagogue de Nazareth au début de son ministère : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture que vous venez d’entendre » (Lc 4,21).
À la fin de cette messe, nous allons invoquer le Saint-Esprit et je vais consacrer le Saint-Chrême, l’huile sainte à laquelle j’aurai mélangé un parfum précieux. Cette Huile servira à la célébration des baptêmes et des confirmations. Elle sera utilisée aussi pour l’ordination d’une dizaine de prêtres le 28 juin prochain à La Castille.
Nous tous qui avons été marqués de cette Huile, nous qui avons reçu l’onction, il est bon que nous nous demandions quelle odeur nous dégageons : est-ce vraiment la bonne odeur de Dieu ? le parfum spirituel de l’amour et de la miséricorde ? l’odeur persistante de l’Evangile du salut ? C’est ce que signifie l’huile parfumée marquant notre front le jour du baptême et de la confirmation, nos mains de prêtre le jour de l’ordination, et la tête de l’évêque au jour où il est consacré comme je le fus à Châlons il y a 9 ans. Un évêque m’avait dit avec le sourire quelques jours après à Lourdes : « tu sens encore le Saint-Chrême ! »
Les odeurs tiennent une place importante dans notre registre sensible. Le langage courant utilise bien des mots ou expressions pour décrire des réalités de la vie humaine : « ça sent pas bon, cette affaire » ; « ça ne sent pas la rose ici » ; « ça sent le sapin » ; « ça sent le soufre » ; « je ne le sens pas » ; « je me sens tout drôle » ; « je ne le sens pas, celui-là » ; « mettre quelqu’un au parfum » ; « suivre une personne à la trace » ; « ne pas être en odeur de sainteté » ; « mourir en odeur de sainteté »… Une odeur peut être attirante ou répulsive, subtile ou banale, franche ou légère. Nous sommes conquis ou nous nous détournons en nous pinçant le nez.
Eh bien, enfant de Dieu ! tu portes le parfum de la sainteté de Dieu ! Tu as reçu l’onction spirituelle qui fait de toi un messager de la Bonne nouvelle comme Jésus lui-même ! A toi de répandre la bonne odeur du Seigneur que l’Année Sainte, le Jubilé de l’Espérance peut nous fait redécouvrir et décliner sous les mots : bienveillance, tendresse, bonté, compréhension, réconciliation, amour, réconfort, douceur, support mutuel, amabilité, fraternité, … L’apôtre Paul nous dit dans la 2è lettre aux corinthiens, v.14 : « Rendons grâce à Dieu qui nous entraîne sans cesse en son cortège triomphal dans le Christ, et qui répand par nous en tout lieu le parfum de sa connaissance. » Les nombreux catéchumènes, 175 adultes et 70 jeunes dans notre diocèse, presque 18 000 au total dans toute la France, ont été attirés par cette odeur de sainteté qui émane de Jésus lui-même. Certains ont été touchés par notre témoignage de foi et notre engagement de charité. D’autres ont frappé à la porte pour trouver une famille, pour recevoir des réponses à leurs questions sur le sens de la vie alors que l’actualité angoissante les assaille et les influences déviantes cherchent à les piéger. Réjouissons-nous d’accueillir tant de nouveaux chrétiens. L’onction parfumée toute fraîche qu’ils recevront lors de la vigile pascale va nous réveiller et nous stimuler dans la foi et l’espérance, pour un authentique renouveau de nos vies.
Et toi, prêtre du Seigneur ! Toi aussi, tu portes le parfum de la sainteté de Dieu ! Au jour de ton ordination, tes mains ont reçu la sainte onction et tu agis au nom du Christ Prêtre, tu lui es configuré, tu es prêtre à plein temps. Cette onction d’huile parfumée, tu ne l’as pas reçue pour concentrer les attentions sur toi ou être mis au pinacle. Elle t’a été conférée pour répandre la bonne odeur de la charité divine dans tous les actes de ton ministère. Quand tu parles, enseignes, encourages, réconfortes, quand tu célèbres la messe, quand tu donnes le pardon des péchés ou l’onction des malades, quand tu visites une famille, quand tu sers les pauvres, quand tu accompagnes les pèlerins, chaque fois, c’est Jésus qui parle et qui enseigne, Jésus qui guérit et relève, Jésus qui offre sa vie en sacrifice et pardonne les péchés. Et moi évêque, cette onction a marqué ma tête pour signifier que j’ai été consacré pour être le sacrement du Christ pasteur et tête du troupeau. Prêtres et évêques, le Seigneur nous invite à nous convertir encore pour lui ressembler toujours plus et manifester de façon efficace par nos gestes et nos paroles que lui, il agit, il donne sa vie, il pardonne, il répand sa grâce. Ce soir, rassemblés dans la cathédrale, concélébrant avec l’évêque, entourés du Peuple saint de Dieu, nous revoyons ce moment de l’onction de nos mains, nous faisons mémoire de l’ordination reçue, nous laissons l’Esprit-Saint nous renouveler dans notre configuration au Christ qui avance vers sa Passion et offre sa vie en sacrifice.
Le parfum du Saint-Chrême marquera donc, je le redis, le front des nouveaux baptisés pendant la nuit de Pâques et au-delà, chaque Dimanche dans toutes nos paroisses, il coulera aussi sur le front des nombreux jeunes et adultes qui seront confirmés d’ici l’été, il imprégnera les mains des 10 diacres que j’ordonnerai prêtres le 28 juin dans notre cathédrale de verdure à La Castille. Ce parfum se répandra tout à l’heure quand je le verserai dans l’huile. Il provoquera pour toute l’assemblée une émotion spirituelle, nous goûterons la présence du Seigneur qui répand sa bonté dans nos vies pauvres et blessées, nous ressentirons vraiment la proximité de Dieu qui rafraichit nos existences par sa grâce, source de renouveau et promesse de résurrection.
Nous devons veiller au parfum que dégagent notre vie chrétienne, nos paroles, nos actes, nos services, notre mission dans l’Eglise, notre ministère, notre consécration religieuse. Nous devons veiller aussi à l’odeur que dégage notre vie ecclésiale, notre fraternité chrétienne, car nos replis et nos peurs, nos enfermements dans des postures qui nous arrangent et nous offrent de fausses sécurités ne répandent pas vraiment une bonne odeur. L’appel de Dieu nous pousse à nous convertir sans cesse en nous lavant dans la source baptismale qui continue de couler pour nous dans le sacrement de pénitence et réconciliation, le « second baptême » comme l’appelait par exemple saint Ambroise, évêque de Milan au IVè siècle.
Je vous propose deux pistes pour la poursuite de ce Jubilé, année sainte placée sous le signe de l’espérance. En effet, l’espérance sent bon la confiance et la paix, la joie et la charité.
– Une conversion de notre regard sur les autres : qu’est-ce qui doit être changé dans notre jugement sur le prochain : il est comme ci, il est comme ça, elle a dit ceci, elle a fait cela … « c’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres qu’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples » dit Jésus (Jn 13,35). Je souhaite que chacun d’entre nous, moi le premier, nous laissions l’Esprit de sainteté et de charité nous libérer de nos armures ou forteresses personnelles, nos carapaces, nos raideurs, nos rancunes, nos mépris, pour aller de l’avant et répandre ensemble, par le lien de la charité, la bonne odeur de Dieu dont le monde a tant besoin.
– Une conversion de notre ardeur missionnaire : il s’agit de laisser le souffle de Dieu nous faire avancer : répandre l’odeur de l’Évangile ne se fait pas en restant chez soi ou entre semblables dans des cercles d’habitués, mais il faut répondre joyeusement au mandat missionnaire donné par Jésus à ses apôtres « Allez dans le monde entier, de tous les peuples faites des disciples, baptisez-les au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé ». Le Seigneur m’a envoyé pour vous guider tous, tel un « pèlerin d’espérance » sur le chemin de la Mission. Ma première lettre pastorale vient de sortir, intitulée « Ancrés dans l’espérance ». Elle sera distribuée aux prêtres tout à l’heure et vous la recevrez à partir de demain dans vos paroisses. Je souhaite que ces perspectives permettent à chacun d’avancer en « pèlerin d’espérance » et de répandre la bonne odeur de Dieu.
Les prêtres vont maintenant renouveler les promesses de leur ordination, se rappelant que leur ministère les conduit à guider leurs frères en leur offrant l’onction sainte de la charité pastorale qui donne l’espérance.
Les diacres vont aussi redire leur engagement à être des serviteurs authentiques qui répandent le parfum de la proximité et de la tendresse de Dieu pour les pauvres, les malades, les prisonniers, les exilés, les familles déchirées, les enfants blessés … le parfum du service fraternel qui redonne l’espérance.
L’évêque aussi, envoyé comme pasteur et qui doit être selon les mots de saint Jean-Paul II, un « prophète de l’espérance » va renouveler son engagement à servir fidèlement le peuple qui lui est confié.
Tous, baptisés, enfants de Dieu, renouvelons l’offrande de nos vies dans un sacrifice spirituel dont le parfum répandra dans tout le Var la lumière de l’espérance.
Amen.
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